STUD COLE – Burn, Baby Burn

Les as du rock'n'roll, épisode 7

   

Quoi? Qu’est-ce que c’est? L’alarme incendie?… Assaut de mammouth épileptique? Ce cri perçant, ce brame de défi, Ragnarok enfin, l’Armageddon? Et ce tonnerre de fuzz, ce break fracassant?

Non, c’est Patrick Tirone, ou plutôt Stud Cole, petit mec de Los Angeles, mèche arrogante, qui, à trop biberonner aux ondes FM rock’n’rollantes dans son enfance nouillorkaise, n’est jamais redescendu de son nuage. En pleine communion Summer of Love, au milieu des hippies à poil long et des lecteurs de Tolkien, il rêve pin-up, cadillacs roses, et se fantasme en crooneur malsain et solaire.

C’est peu de dire que le caverneux “Burn Baby Burn” induit le déhanchement: c’est un pur et simple appel au rut. Sur un rythme menaçant, à la fois lourd et ophidien, le chanteur surexcité avale le micro, prodigue halètements outranciers, trémolos lascifs, succions incommodantes. Matrones, planquez vos morveuses. Soutenues par un batteur en état second, les guitares jouent rock’n’roll mais sonnent acide. C’est Sun Records qui donnerait dans le groove sixties.

Réincarner Ricky Nelson un quart d’heure avant Woodstock : difficile de faire plus donquichottesque. Les cent exemplaires de son disque, envoyés à grand renfort de matériel promo aux radios, ont dû provoquer bien des ricanements et des perplexités chez les dj du coin. Suite prévisible de ce bide : l’homme disparaît sans laisser de traces.

Ce disque, exhumé en 2002 par les philanthropes fêlés de Norton, contient tout et n’importe quoi. Sur un son approximatif, poisseux, des fuzz froissées crépitent sur fond de piano bastringue, et au détour d’un couplet un solo de flûte surréaliste tombe du ciel. Du très raide (“Don’t Do that”), voire de l’explosif (“Feels Good“), côtoie un bouquet de ballades où Stud Cole se vautre avec brio dans la réverb’ et l’emphase (“Always“ & Always“, le bluesy “Oh… I Love You“, “Stop The Wedding“).  Le truc “Burn Baby Burn“ est tellement bon qu’il ressert le riff et le phrasé deux fois.

1968: trop tôt, trop seul, trop illuminé. Comme tous les retardataires en avance sur leur époque, ce candide beau gosse avait compris que seuls les classiques restent modernes, là où les modernistes se démodent déjà. Peu après, retour d’Elvis, les reprises de Creedence (Dale Hawkins ou Little Richard), et American Graffiti… les Cramps! Stud Cole, rockabilly psychédélique possédé, leur a pavé la voie.

 

 

Vidéos :

“Burn Baby Burn“

“Oh… I Love You“

“Always & Always“

   

A écouter :

stud.jpgRéédition Norton 2002, Stud Cole, Burn Baby Burn. Assez indispensable donc, pour les Crampsiens désireux de couper leur Hasil Adkins proverbial et leur inévitable Link Wray d’une saveur nouvelle, et à qui une prod’ mal léchée ne fait pas peur.

 

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ratel
Invité
ratel
18 juin 2012 1 h 31 min

duh, me semble l’avoir eu dans les mains çui-là, et l’avoir reposé. ce fut une erreur, voire une faute :$

saisissant, mais résiste-t-il bien aux réécoutes ?

Béro
Invité
Béro
19 juin 2012 0 h 18 min

“Burn Baby Burn” ne s’use pas sur la durée, garanti. Le reste de l’album est stylistiquement si outré, qu’on le ressort pas toutes les semaines, d’accord. Mais je ne le classerais pas non plus
parmi les simples curiosités d’esthète. Loin de se dégonfler une fois passé l’effet de surprise, il tient assez bien le coup, soutenu par la conviction hors norme de l’interprète… Enfin, je dis
pas ça pour te déprimer!

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