(Carpark / Wichita 2012)
Parmi les événements collatéraux du retour en grâce des années 90 dans les influences revendiquées d’une nombreux groupes rock actuels (symbolisée par l’émergence de revivalistes tels que Yuck, Mazes, Cage The Elephant et un regain d’intérêt pour Pavement, Sonic Youth, Dinosaur Jr et les débuts du grunge), le fait que Steve Albini soit redevenu un producteur recherché est de nature à intriguer. Incontournable durant sa décennie de règne qui l’a vu oeuvrer pour les Pixies, Nirvana, The Jesus Lizard, PJ Harvey, cette figure du passé dont on se gaussait durant les années 2000 est de nouveau à la mode. Contacté par des groupes qui cherchent à retrouver la patte du maître, ce son particulier aux 90s qui donne une couleur grisâtre aux morceaux (mur de saturation, basse en avant, guitare lead carillonnante, batterie rêche), l’opiniâtre producteur revit.
Parmi les nombreux groupes qui ont récemment fait le choix de l’albinisation, Cloud Nothings viennent de sortir l’album de revival 90s le plus convaincant qu’on ait entendu. Au delà du son à la plastique parfaite, la variété des morceaux du quatuor de Cleveland témoignent d’un talent multiple : de la powerpop taillée pour les radios campus de “Fall In” aux élans nirvanesques de “No Sentiment” (cris éraillés, refrain en escalier), la plongée dans les années MTV est bluffante.
Le grand moment de l’album demeure “Wasted Days” qui arrive en seconde position dans la succession des morceaux et place le disque sur une orbite stratosphérique : sur un riff de guitare irrésistible qui tourne à 100 à l’heure, le groupe développe une jam magistrale qui fait décoller le morceau au delà de la barre des 8 minutes. C’est dans ce genre de moments que Cloud Nothings s’émancipent de leurs influences et devient réellement passionnant. En témoignant de son goût pour les formes les plus aventureuses de rock’n’roll, le groupe dévoile un talent fou et une capacité à surprendre que les morceaux les plus sages de l’album ne laissent pas percer. Qu’on ne se méprenne pas : sur la globalité de l’album, Cloud Nothing sont excellents. Sur ce morceau, ils deviennent formidables.
L’album a la grande qualité d’être court – et ainsi de ne jamais lasser. C’est d’ailleurs la seule entorse faite à l’exercice de pastiche, et la seule fois probablement où l’élève dépasse ses maîtres. Là où les albums des années 90 s’éternisaient souvent sur plus d’une heure de musique (l’heure n’était pas à la concision : on venait de passer au CD et les groupe s’indulgeaient au delà de 4 minutes par morceaux et se sentaient obligés de glisser une quinzaine de morceaux par album, au mépris parfois d’un quelconque contrôle qualité), Attack On Memory s’achève à l’issue de 33 plaisantes minutes.
Tracklisting :
- No Future/No Past
- Wasted Days *
- Fall In
- Stay Useless
- Separation *
- No Sentiment
- Our Plans *
- Cut You
Vidéos :
“No Future / No Past”