KEVIN AYERS - The Unfairground

KEVIN AYERS – The Unfairground

Résurrection

(Lo-max 2007)

Septembre 2007. The Unfairground tourne sur la platine pour la première fois. Quelques notes de trompette, une rythmique débonnaire qui envoie des notes sucrées, puis la voix du grand Kevin envahit la pièce. Un sentiment nous envahit, fort, difficile à décrire. On est tellement heureux qu’on a les larmes aux yeux. On a retrouvé un ami qu’on croyait disparu, un compagnon fidèle des moments de solitude, le génie le plus sous-estimé des années soixante anglaises, l’immense Kevin Ayers.

Aujourd’hui méconnu, Ayers est une des figures majeures du rock psychédélique anglais. Il a écrit les meilleures chansons de Soft Machine avant de quitter le groupe peu après leur premier album – suite à une longue tournée américaine en première partie de Jimi Hendrix, il décida que la vie de rock star était trop fatigante pour lui. Il continua sa carrière en solo, entre vie de pacha à Majorque et tournées européennes pour défendre les chefs d’œuvres enregistrés au gré de ses envies. Joy Of A Toy, Shooting At The Moon, Whatevershebrinswesing, ses trois premiers albums, sont emplis de chansons pop psyché dont la beauté mélodique n’a d’égale que la sobriété et la simplicité dans les arrangements. Plutôt rare pour des disques du début des années 70.

Le reste de sa carrière oscillera entre albums enregistrés à la va-vite et vie de débauche. A l’écart du monde sur son île des années 70 jusqu’à aujourd’hui, Ayers cultive son image de reclus déjanté et sort des disques de plus en plus déconnectés du monde pour un public indifférent. On trouvera ainsi l’insaisissable blondinet chanter des conneries sucrées comme “Guru Banana” ou “Mister Cool” avec un verre de rouge à la main alors que le monde tourne punk. Sa dernière livraison remonte ainsi à 1992, avec un album sans intérêt sorti confidentiellement.

On croyait que l’artiste qui sommeillait en Kevin Ayers était mort, on attendait rien de cette nouvelle livraison hormis la satisfaction de le revoir sortir sa guitare. Or, The Unfairground est excellent, mieux même, c’est un chef d’œuvre, une renaissance. Pete Doherty chante dans “Delivery” : “Make pretend it’s 1969 forever“, Ayers semble avoir entendu le conseil.

Premier retour aux sources : The Unfairground commence par un air de fanfare qui fait écho à l’ouverture de son premier album Joy Of A Toy. La voix de Kevin arrive, on a le souffle coupé devant la beauté du morceau. On est dans nos petits souliers, tout est possible désormais. Quand arrive l’insurpassable “Cold Shoulders”, au texte magnifique de vieux loser sur le retour (“I don’t understand anymore as I grow older / Nothing seems to be clearer than before / Old shoulders become cold shoulders / Nothing left to dream on »), on ne sait plus où donner de la tête..

Les arrangements sont sublimes. Accompagné d’un quatuor à cordes, Kevin Ayers joue un de ces arpèges dont il a le secret et pose son timbre unique de baryton timide qui est demeuré inchangé depuis 1971. On est pris dans l’ambiance intemporelle de la chanson quand en guise de pont surgit la voix irréelle de Robert Wyatt, puis un solo de trompette qui fait ressortir la mélancolie de la mélodie. On est dans un rêve éveillé. C’est aussi beau que “Lady Rachel” ou “Town Feeling”. Du Kevin Ayers à l’apogée de son talent. Le retour sur terre du génie égaré. Détail technique : il semble que pour cette séquence la voix de Robert Wyatt a été samplée à chaque note pour faire une sorte de robertwyattophone. Il suffisait d’y penser (j’en veux un!).

L’intensité ne faiblit pas tout au long de l’album, qui scintille du début à la fin. Ce que Paul McCartney et Ray Davies ne sont plus capables d’écrire, Kevin Ayers le chante avec une aisance et une classe impressionnantes. Les mélodies sont limpides, mises en valeur par des arrangements feutrés et classieux. Du violoncelle de “Walk On Water au piano-bar de “Run Run Run”,  des violons de “Friends And Strangers” à l’accordéon de “Baby Come Home”, chaque chanson possède un écrin magnifique. The Unfairground est un grand disque.

 
 
 
Tracklisting :
1. Only Heaven Knows  *
2. Cold Shoulder  *
3. Walk On Water *
4. Friends And Strangers
5. Shine A Light
6. Wide Awake *
7. Baby Come Home *
8. Brainstorm
9. Unfairground
10. Run Run Run *

 

 
Vidéo :

“Baby Come Home”

 
“Cold Shoulder”
 

 

Vinyle

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2 Commentaires
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G.T.
Invité
G.T.
30 octobre 2007 2 h 28 min

C’est marrant qu’il sorte un disque quand sort celui de son ex-compère Robert Wyatt. Je n’ai pas encore trop écouté le “Comicopera” de Wyatt, mais le peu que j’ai entendu m’a l’air pas mal du tout.
Et vu ce que tu en dis, faudra aussi que j’écoute ce nouveau Ayers… 

kozmigroov ConneXion
Invité
2 septembre 2011 8 h 36 min

curieux, tout le monde dénigre still life with guitar alors que pour moi c’est un des meilleurs Ayers !!!

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