(Locust 2009)
Attention: objet musical sans équivalent contemporain ! Sorti sur un label de Chicago, Dia est un album qui a d’ores et déjà une place à part dans les sorties de l’année 2009.
Ce disque prodigieux, hors du temps et des modes, aurait pu être enregistré en 1970 ; selon les patrons du label Locust, il l’a été en 2006. Dia se présente comme une sorte de voyage dans l’univers créé par une seule personne, Damon MacMahon. Que celles et ceux qui attendent d’un disque que mélodies sucrées et chansons évidentes passent leur chemin : Dia est de ces disques qui livrent peu à peu leur incroyable richesse. Comme pour les Liars, il faut accepter de se perdre complètement dans cette expérience, abandonner ses repères et se contenter de suivre la création face à laquelle on se trouvé placé.
Imaginez les Strange Boys soudainement pris d’une crise de paranoïa aiguë, vous aurez une idée des deux premiers morceaux du disque, « Amen Dunes » et « Miami Beach ». Les structures habituelles des morceaux disparaissent rapidement pour laisser la place à des suites étranges – telle la troisième piste, l’hypnotique « In Caroline », où le chanteur ânonne sans cesse les deux seuls mots du titre du morceau, à la manière d’un mantra.
Si, pour la plupart des compositions, la guitare – acoustique ou électrique – est au centre des débats (« Patagonian Domes », « By The Bridal », « White lace »), la musique est ici accompagnée d’un nombre impressionnant de procédés sonores (aucune limite à l’utilisation de l’écho, de la réverbération, non plus que des saturations diverses), où l’amateurisme et l’artisanal se le disputent parfois, mais dont l’effet sur l’auditeur est toujours pertinent. L’album propose aussi des pistes immédiatement marquantes et efficaces, à l’image de « Patagonian Domes ». Ces morceaux sont des indices évidents du talent de MacMahon, et invitent à une écoute plus attentive de l’ensemble de Dia.
Le disque possède des moments angoissants : la boucle oppressante de « White Lace », mais aussi les passages où le chant de McMachon paraît complètement à l’abandon (sur « Castles » ou « Hauling The Dead » par exemple). Il est d’ailleurs intéressant de remarquer que les morceaux les plus poignants ne sont pas toujours ceux dont le son a été le plus travaillé, tant le timbre de la voix de MacMahon est expressif. Voix éraillée, criarde, posée, réenregistrée pour les chœurs ou chantée en fausset : MacMahon fait parler l’ensemble de ses capacités vocales, sans retenue aucune. Pour l’approche musicale choisie, comme pour l’impudeur avec laquelle les compositions sont livrées, la parenté (on ne parlera pas de comparaison) avec Syd Barrett se doit d’être évoquée. L’album s’achève sur un morceau à l’ambiance sombre, « Breaker », dont la violence et la noirceur sont parfaitement orchestrées – pour cette piste en particulier, l’écoute au casque s’avère traumatisante.
Ce disque est tout sauf anodin. Pour son premier album, MacMahon / Amen Dunes a livré un album profondément personnel à la résonance universelle : sans aucun doute une franche réussite, cet album marquera tous ceux qui l’écouteront, pour longtemps.
P.S. : MacMahon a écrit cet album pendant une période d’isolement dans les montagnes Catskill, dans l’état de New York. Il habite aujourd’hui dans un petit appartement à Pékin. La suite s’annonce intéressante…
Tracklisting :
- Amen Dunes *
- Miami Beach *
- In Caroline
- Fleshless Esta Mira, Wife of Space *
- Patagonian Domes *
- By the Bridal *
- White Lace *
- Castles
- Hauling The Dead
- No Shot
- Two Thousands Islands *
- Breaker
Le MySpace d’Amen Dunes : www.myspace.com/amendunes
Le site du label Locust Records.
Vidéos :
“In Caroline”
Vinyle :
Minimaliste, pour le moins !