(My Dad Recordings 2006)
La grande classe, c’est quelque chose qu’on a ou qu’on n’a pas. Certains sont persuadés de l’avoir en laissant leur chevelure se développer dans la nuque et en arborant une moustache militaire. Vokuhila Uppelippe disent les allemands. N’est pas Georges Abitbol qui veut. Chanter les meilleures chansons du monde sans avoir l’air d’y toucher tout en portant costard à rayures et un chapeau melon est déjà un moyen plus convaincant.
Jim Noir a pris la seconde option, sinon on ne parlerait évidemment pas de lui. Son premier album est l’album pop le plus parfait des dernières années. Tower Of Love propose plus que des chansons : un véritable manifeste pop. “Et si on se remettait à jouer de la pop classieuse, ambitieuse et un brin excentrique ?” Ceux qui ont l’impression – justifiée – que le rock anglais soi-disant indé tourne en rond en ce moment (Maccabees, Good Shoes, Harrisons, The Sunshine Underground… tous des clones inutiles) ont accueilli cet album sorti pendant l’été 2006 comme bouffée d’oxygène salvatrice.
Jim Noir est un personnage à part, un doux dingue comme seule l’Angleterre sait en produire, un rêveur traumatisé par la musique des sixties (The Beach Boys, The Beatles, Simon & Garfunkel) qu’on aurait abandonné avec sa guitare dans le rayon jouets d’un centre commercial. Ses mélodies sont d’une aisance telle qu’on jurerait les avoir entendues avant (“My Patch”, “I Me You I’m Your”, “Computer Song”, la trilogie parfaite qui ouvre l’album, “Eany Meanie”), leur enrobage est parfait. Les chœurs omniprésents et les arrangements électro-acoustiques inventifs (basse au premier plan, violons pincés, synthés primitifs, flûte traversière, sitar) donnent un cachet sixties à cet album hors du temps. On navigue entre “Good Day Sunshine” et “Sunshine Superman”, entre “Mrs Robinson” et “Heroes & Villains”… L’ambiance Swinging London créée par les comptines pop de Jim Noir transporte l’auditeur dans l’univers fantasmé des années soixante. A son contact on a l’impression qu’on pourrait les revivre rien qu’en fermant les yeux. C’est magique. Les chansons de Jim Noir ont la qualité enfantine de celles de Syd Barrett ou de Kevin Ayers, une certaine innocence, une sorte de naïveté touchante. A l’instar de ces deux génies, Noir semble posséder la faculté de faire des chefs d’œuvre absolus sans avoir l’air d’y toucher.
On espère que nombreux seront ceux qui répondront à l’appel de cet album délicieux et déjà primordial. Jim Noir vient de jeter un pavé dans la mare pop anglaise. Après des années de résistance solitaire, Belle & Sebastian viennent de se trouver un allié de choix dans la restauration de cet art britannique qu’est l’écriture de chansons pop. Un nouveau chef de file à vrai dire.
Tracklisting :
1. “My Patch” *
2. “I Me You I’m Your”
3. “Computer Song” *
4. “How to Be So Real”
5. “Eanie Meany” *
6. “Tower of Love”
7. “The Key of C” *
8. “Turbulent Weather”
9. “Turn Your Frown into a Smile”
10. “A Quiet Man”
11. “Eanie Meany 2”
12. “The Only Way”
Le MySpace de Jim Noir : www.myspace.com/jimnoir
Vidéos :
“My Patch”
“Eany Meany”