(Heavenly 2017)
S’ils savent toujours draper leurs sorties de mystère, de fantaisie et de douce folie, on ne peut pas dire que les australiens de King Gizzard & The Wizard Lizard aient réussi un grand coup de com’ en novembre dernier quand ils ont annoncé au monde la sortie de leur nouvel album au concept ambitieux. Il y avait pourtant dans leur communiqué de quoi rendre fous leurs fans les plus fidèles : le groupe y annonçait la sortie de pas moins de 5 albums pour l’année 2017, le premier d’entre eux étant enregistré intégralement avec des instruments accordés selon des tonalités sortant de l’ordinaire, inspirées des gammes orientales.
Pour mieux appuyer son propos, le groupe offrait un premier extrait censé représenter cette (r)évolution technique : l’entêtant “Rattlesnake” qui sonnait… peu ou prou comme la moitié des morceaux de I’m In Your Mind Fuzz ou Nonagon Infinity. Pas idéal comme première impression. Pour le renouveau, on repassera. Le groupe aurait sans doute été plus inspiré de mettre en avant un des morceaux véritablement mutants que compte l’album (et ils sont nombreux), comme “Open Water” ou “Sleep Drifter”. Au moins la surprise aurait été totale, et le groupe aurait dans un second temps pu rassurer ses fans avec les sons familiers de “Rattlesnake”.
En foirant leur promo, King Gizzard ont au moins eu le mérite de faire exploser la bulle hype qui les entoure depuis I’m In Your Mind Fuzz. Ainsi, personne n’attendait grand-chose de leur nouvel album, qui s’annonçait comme une redite doublée d’un concept effrayant, voire prétentieux. Pourtant, Flying Microtonal Banana – dont le titre est tiré du surnom donné par Stu McKenzie à sa guitare microtonale – est une véritable réussite. Osons même le dire : c’est un des meilleurs disques du groupe. King Gizzard va puiser au source du psychédélisme originel avec ces sonorités et gammes orientales où les intervalles sont plus petits que les demi-tons. La dissonance – perçue par nos oreilles occidentales inéduquées – est au cœur de ce disque qui mélange les cultures avec un talent d’alchimiste.
On pense à Gong, à Agitation Free, aux compilations de type Turkish Psych, à tous les bédouins psychédéliques du tournant des années 60/70 pour qui le rock était une matrice aux possibilités infinies. C’est le coup de génie de Stu McKenzie et ses comparses sur cet album : avec cette idée folle (doublée d’un certain sens du risque et d’une ouverture d’esprit rafraîchissante), ils s’ouvrent sur des sonorités étrangères (le moyen-orient, l’Inde, notamment avec l’inclusion de ce qui semble être un shehnai sur plusieurs morceaux) tout en gardant les pieds fermement ancrés dans leur univers kraut-psych désormais familier. Surtout, ils tirent de cette réinvention, une poignée de chansons magnifiques aux parfum oriental (“Open Water”, “Sleep Drifter”, “Melting”, “Anoxia”) qui sortent des sentiers battus.
En se fixant de nouvelles contraintes à chaque album, King Gizzard parvient à se réinventer avec un succès jamais démenti pour l’instant. Si les autres volumes prévus cette année sont de cette trempe (on flippe un peu pour celui “jazzy” prévu avec Mild High Club), le roi gésier aura véritablement mérité son trône.
Tracklisting
- Rattlesnake *
- Melting
- Open Water
- Sleep Drifter *
- Billabong Valley *
- Anoxia *
- Doom City
- Nuclear Fusion
- Flying Microtonal Banana
Vidéos
“Rattlesnake”
Un documentaire qui explique le genèse de l’album
“Sleep Drifter”