(Speedy Wunderground 2020)
C’est sans doute le meilleur album dont vous n’avez pas entendu parler en 2021. Sorti en fin d’année 2020, alors que le monde de la musique était à l’arrêt et que toutes les publications d’albums mises en stand-by par le confinement affluaient, Positive Mental Health Music est passé inaperçu, noyé dans la masse.
Pourtant, il y a peu de disques qui nous ont autant fait vibrer durant ces douze mois de 2021 que cet album, sans doute un de ceux qui nous a le plus accompagné en ces temps moroses. La raison ? Un talent d’écriture remarquable conjugué à une science de la mélodie qui fait mouche. A la fois drôles et désabusées, les chansons de Tiña résonnent de par leur approche brutalement honnête de la dépression et la légèreté avec laquelle le chanteur narre ses tourments.
Faux groupe mené par un leader omnipotent, Tiña viennent de Londres et sont signés sur le très hype label Speedy Wunderground. Vêtu de rose de la tête au pieds sur scène (avec un bermuda et un chapeau de cowboy de pacotille), Josh Loftin est un grand excentrique dont on ne trouve quasi aucune trace sur internet avant ce projet alors qu’il semble proche de la trentaine. Etrange. Son talent ? Composer des chansons pop psychédéliques lancinantes qui doivent autant au spleen doux de Brian Jonestown Massacre (“I Feel Fine”) qu’à la finesse de Parquet Courts (“Golden Rope”, “Rosalina”), ou la pop indé mélancolique américaine du début des annéees 90-2000 façon Eels (“Growing In Age”) ou The Kingsbury Manx (“It’s No Use”). Comme son nom l’indique, Positive Mental Health Music a été créé par son auteur pour aller mieux. il n’y a qu’à écouter le morceau d’ouverture (“Buddha”) pour s’en convaincre, avec son refrain martelé “This is fine” qui suit des déclarations plus blasées les unes que les autres (“I hope that this song does someone for someone, and if not I have done at least a song“).
On ne sait pas si le résultat est concluant du côté de sa santé, mais côté artistique, c’est une réussite éclatante. Positivement Mental Health Music est sans doute l’album le plus gai dans lequel on ait entendu quelqu’un parler aussi ouvertement de sa dépression. Quiconque ne parlant pas un mot d’anglais pourrait croire que cet album est une célébration festive, un disque indie-rock léger porté par des mecs rigolos vêtus de rose. Le génie réside dans les arrangements, avec ce clavier lumineux qui se conjugue à une guitare western contemplative, qui donne une impression de légèreté à l’ensemble. La simplicité des mélodies, le ton de l’ensemble et l’étrangeté de ce disque en font un de ceux qui nous ont parlé durant la difficile période post-confinement, quand le monde rouvrait peu à peu mais que les restaurants, bars et salles de concerts étaient encore en pause. Merci à Tiña de nous l’avoir rendu moins difficile.
EDIT : Le groupe s’est sabordé le 28 novembre 2022. Manifestement l’entreprise consistant à utiliser la musique comme exutoire s’est révélée être un échec, Loftin avouant ne pas se sentir capable d’être le leader d’un groupe. Regrets éternels.
Tracklisting
1. Buddha *
2. Rosalina
3. I Feel Fine *
4. Rooster
5. Closest Shave
6. Growing In Age *
7. New Boi
8. Golden Rope *
9. It’s No Use
10. Dip *
11. People
Vidéos
“Dip”
“Closest Shave”
“Rosalina”