(Rough Trade 2010)
A peine plus d’un an après la sortie de leur premier album ...And Girls Club qui nous avait énormément plu, les Strange Boys d’Austin, Texas sont de retour avec quelques changements dans leur besace. Signe de la popularité nouvelle du groupe, Be Brave bénéficie d’une vraie sortie internationale, le groupe étant désormais sur le roi des labels indépendants, Rough Trade.
En quittant In The Red le groupe s’est quelque peu éloigné de sa formule garage-rock puriste pour s’ouvrir vers de nouvelles sonorités (saxophone et piano notamment, rien de révolutionnaire mais un univers nouveau pour le groupe), et a quelque peu modifié son effectif pour y parvenir. Exit donc Matt Hammer, le batteur avec qui Ryan Sambol avait fondé le groupe en 2001 (alors en duo) pour de nouveaux venus tels Seth Densham et Jenna Thornhill-DeWitt, ex-membres du défunt groupe garage californien Mika Miko.
L’album, très attendu par les amateurs de rock garage minimaliste, déroute parfois par son inattendu côté folk-rock et ses mélodies pop. Plus facile d’accès que le précédent, Be Brave est un album de pop sixties empli de belles chansons, telle l’ouverture “I See” portée par un harmonica dylanien et un carillon qui lui donne des atours de comptine. La voix de Ryan Sambol, toujours aussi éraillée, porte une mélancolie qui donne une intensité incroyable à ses morceaux tout au long de l’album.
Be Brave contient deux faces distinctes : en début d’album, le groupe déploie son garage-rock délicat dans une ambiance ensoleillée. On retrouve les Strange Boys tels qu’on les connaissait sur ...And Girls Club : un groupe au groove patchouli irrésistible, héritier des Shadows Of Knight et autres amateurs éclairés. Le single “Be Brave” et son improbable solo de saxophone, la complainte “Da Da” et la formidable “Night Might” répondent à cette description.
L’album avançant, les morceaux deviennent de plus en plus folk. Cette mue commence avec “Friday In Paris” où le groupe tente d’atteindre le son mercuriel de Highway 61 Revisited (cet orgue!), puis le tempo ralentit avec “Between Us”, annonçant une fin d’album de plus en plus dépouillée et acoustique. “Dare I Say”, “All You Can Hide Inside”, “You Can’t Only Love When You Want” sont des complaintes folk dans lesquelles Ryan Sambol miaule plus que jamais. Le fond de la dépression est atteint avec “The Unsent Letter” et son piano hanté. Sambol n’apparait plus comme le chanteur malicieux de …And Girls Club, mais comme un jeune homme troublé. La face B de l’album s’achève ainsi dans une impression de langueur et de tristesse qui soulève quelques interrogations quant à la direction future du groupe. Les Strange Boys sont ils encore un groupe de rock ?
Un morceau ici symbolise la dualité de cet album, tantôt rock, tantôt folk : “A Walk On The Beach” commence comme une ballade triste avant d’accélérer, laissant le groupe déployer sa dynamique particulière. Difficile de ne pas avouer que c’est cette deuxième facette qu’on préfère chez le groupe. Be Brave nous frustre ainsi par la faible quantité de chansons rock’n’roll et la profusion de morceaux acoustiques sanglotant qui plombent la fin d’album. Pas de quoi crier au gâchis – car la qualité d’écriture ici est largement au-dessus de la moyenne –, juste de quoi râler un peu pour les fans qui attendaient des Strange Boys le premier grand album de la décennie. On patientera encore un peu.
Tracklisting :
1. I See *
2. A Walk on the Bleach *
3. Be Brave *
4. Friday in Paris
5. Between Us
6. Da Da
7. Night Might *
8. Dare I Say
9. Laugh at Sex, Not Her *
10. All You Can Hide Inside
11. The Unsent Letter
12. You Can’t Only Love When You Want To
Vidéo :
“Be Brave”
Vinyle :
Le groupe est resté fidèle à In The Red pour la marché américain.