Realisateur : John Dower, 2003
Le Royaume-Uni subit ces jours-ci une cure d’electrochocs rock’n’roll qui est en train de réveiller cette place forte de la musique populaire. Soyons objectifs : Londres est la ville la plus cool du monde en 2006. Depuis deux ans, une ribambelle de groupe a pris le pays d’assaut dans la foulée des Libertines. Franz Ferdinand, Bloc Party, Kaiser Chiefs, Razorlight, Arctic Monkeys sont les groupes les plus populaires d’un mouvement de masse pas vu ni entendu depuis 1995 et la fumeuse période de la Britpop.
Sorti il y a trois ans, ce film se voulait une celebration et un bilan amer – voire meme nostalgique – de la derniere grande vague musicale britannique a avoir frappe le monde. Alors que la scene locale se porte mieux que jamais aujourd’hui, un tel deferlement de souvenirs emus et de “c’etait mieux avant…” n’a plus vraiment lieu d’etre mais possede une indeniable valeur educative pour quiconque voudrait decouvrir ce mouvement qui a traumatise une generation d’adolescents.
On y voit evidemment tous les groupes marquants de l’epoque mais aussi les racines du mouvement et les liaisons (dangereuses) avec la politique et l’opportuniste Tony Blair en particulier. Tout cela permet une contextualisation interessante pour quiconque se demande pourquoi Oasis en voulait au monde entier a l’epoque de Definitively Maybe. Le documentaire traite de la montee et de la chute du mouvement Britpop, l’indeniable sommet etant la sortie le meme jour de “Roll With It” d’Oasis et “Country House” de Blur pour la plus grande bataille des charts depuis les annees soixante. S’appuyant enormement sur les interviews des personnages cles de l’epoque (Jarvis Cocker de Pulp en englishman eccentrique, les freres Gallagher fideles a eux-memes, Damon Albarn en loser desabuse), le realisateur John Dower reussit a nous apprendre des choses autant qu’a nous faire passer un bon moment (on rit souvent et la musique est évidemment excellente).
On pourra toujours reprocher certains partis pris (aucune mention de Kula Shaker, on parle a peine de Supergrass tandis que Massive Attack et Portishead sont inclus dans le mouvement a notre étonnement… et Blur, l’album qui a mis un point final a la mascarade est tout bonnement oublie) mais on est heureux qu’un tel reportage existe. Les années 90 ne se sont pas résumées à Nirvana et le gros rock baveux et adipeux americain. A un certain moment, Oasis a reussi a faire croire a des millions d’adolescents qu’ils etaient le plus grand groupe depuis les Beatles. Ils ont explose de facon magnifique et n’ont fait que se parodier depuis mais ce film a le merite de nous rafraichir la memoire et de nous rappeler l’importance et la valeur de tous ces groupes.
En 2005, Oasis et Gorillaz (soit Damon Albarn) se sont encore retrouves en concurrence pour un single numero 1 et la presse s’est fait echo du retour de la guerre Blur/Oasis… ensuite, Kaiser Chiefs ont remis Blur a la mode avec leur premier album sous forte influence Albarn/Coxon pendant que Kasabian faisait renaitre le son de Manchester. Alors que certains ont trouve en Eddie Argos d’Art Brut un heritier de Jarvis Cocker, Graham Coxon est devenu un artiste solo a part entiere et Kula Shaker ont decide de se reformer. La Britpop interesse plus que jamais aujoud’hui et ne semble pas avoir dit son dernier mot…