TOWERS OF LONDON – Blood, Sweat & Towers

Bas du front

(TVT 2006)

Amateurs de rock crétin et de dégénérés chevelus, réjouissez-vous. Des bas-fonds de Londres vient de surgir un nouveau groupe aussi bête qu’énervé, un croisement improbable entre le punk des Sex Pistols, le hair-métal d’Europe et un car de supporters de football anglais en Allemagne : Towers Of London.

Nom extraordinairement con, dégaine ahurissante – jeans moulants troués, t-shirts à épingles, vestes cuir, mullet péroxydée avec effet saut-du-lit, tatouages navrants, air bête –, chansons ineptes jouées avec ferveur… tout en eux devrait nous repousser. Et pourtant… les Towers Of London sont le groupe le plus drôle qu’il nous ait été donné d’écouter depuis The Darkness. Des beaufs arrogants certains de révolutionner le monde, dont la bêtise confine au génie, au point même qu’on en vient à se demander s’ils ne font pas exprès d’être idiots. Un joke band magnifique.

Leur album, superbement intitulé Blood, Sweat And Towers (toujours plus loin dans la gaudriole) se place à mi-chemin entre gros hard-rock FM et punk intégriste. Cela confère aux chansons un son crade appréciable qui permet d’oublier le côté poussif de la plupart des morceaux. Ce qu’il faut savoir, c’est que cette galette oscille constamment entre l’insignifiant et le génialissime. Si plusieurs morceaux ne sont ni drôles ni tout simplement bons (on pense aux chiantissimes “Good Time”, “Start Believing”, “Northern Lights”, “Seen It All” ou ce “King” inspiré de “My Way” de Sid Vicious qui commence avec une section à cordes avant de tourner punk bas du front), le reste est absolument brillant de connerie et véritablement jouissif. Aucun doute là-dessus, vous vous marrerez toujours plus à mimer le riff d'”Air Guitar” qu’à danser en essayant d’avoir l’air cool sur “Love Will Tear Us Apart” – un classique des boites rock londoniennes – de Joy Division.

Towers Of London ont décidé de mettre la finesse de côté et de jouer la surenchère totale. Cela nous vaut plusieurs perles et quelques franches rigolades. La première d’entre elle est donc “Air Guitar”, avec ses “Oooooh” et son refrain débile (“I played air guitar and the place shook over”) qui possède une mélodie qui rappelle (attention) le solo de guitare sur “Common People” de Pulp. Si le concept d’air guitar vous échappe, sautez sur votre lit et imaginez-vous jouer de la six cordes sur ce morceau, vous comprendrez vite.

Sur une paire de morceaux le groupe se place en tant que leader d’un mouvement de rébellion et étale sa vision de la vie. Si “Kill The Pop Scene” enfonce des portes ouvertes (“What d’ya think about that?!”) et penche du côté de Jon Bon Jovi, “Fuck It Up!” présente – en plus d’un gros riff digne des Sex Pistols – des paroles qui expliquent la philosophie de ce groupe qui se branle du monde entier : “You think it’s fair to walk right up/Take my life and fuck it up/I don’t care if every drop’s been drunk”. Le refrain, qu’on croirait beuglé par une meute de hooligans pleins de bière, est un must. Plus fort encore, ce morceau se trouve en double dans l’album : une version acoustique (avec banjo et voix grave de cow-boy) précède dans listing la version “stade de foot”, histoire qu’on comprenne mieux les paroles sans doute. Du grand n’importe quoi.

Les deux meilleurs morceaux ici sont sans doute “On A Noose”, vrai punk efficace, qu’on a du mal malheureusement à dissocier de son clip monstrueux (dans lequel le chanteur Dirk Tourette dévoile son jeu de scène qui consiste à prendre des poses de petite frappe et faire des mimiques soi-disant punk à mourir de rire, tout en tenant le micro) et l’extraordinaire “How Rude She Was”, qui voit les Towers Of London approcher le sublime.

Riff de guitare à deux notes baveuses, refrain eighties, paroles aberrantes… ce morceau montre le groupe à son sommet. Après un inaugural “She came from the city/ She was a high class/Not very pretty/more a pain in the arse” de grande classe, Dirk enchaîne en nommant une des boîtes rock les plus célèbres de la capitale britanique; ce “Boozing at Koko/She don’t want to pogo” inconcevable selon lui entraîne comme réaction un “What did ya say?!” digne de Spinal Tap. On en pleure encore de rire. Succès garanti auprès de vos amis.

Quand le sens de la mélodie se fait absent, les Towers Of London se rattrapent toujours par la précision chirurgicale de leurs textes. On est gratifiés dans “Beaujolais” d’un superbe “She was a girl from the USA/ Used to live a life in luxury/Now she’s drinking Beaujolais/But I don’t like her anyway” qui doit donner des sueurs froides à Ray Davies, lui l’inventeur de la chronique sociale à l’anglaise (sans parler du passage qui commence par “I am a man with mystery…” et du solo de guitare dégoulinant). Ca fout le vertige.

En termes de musique, l’inaugural “I’m A Rat” demeure lui la voie sur laquelle on conseillerait au groupe de continuer. Sur un riff tournoyant façon Datsuns, le groupe réussit à sonner sérieux et solide, loin des pitreries et des clichés hard-rock du reste de l’album où il n’est qu’une grosse blague, une caricature trop grosse pour être vraie.

On ne construit pas une carrière sur une farce, et Blood, Sweat & Towers en une est très drôle qui risque de tourner aigre pour le groupe s’il persiste dans cette voie. On le recommandera néanmoins aux amateurs de second degré et de Spinal Tap qui aiment le rock vraiment très crétin et les pantalons moule-burnes.

 

 

Tracklisting : 

01. I’m A Rat *
02. Air Guitar
03. Kill The Pop Scene
04. Beaujolais
05. Fuck It Up (acoustic Version)
06. King
07. Good Time
08. On A Noose *
09. Start Believing
10. Northern Lights
11. Fuck It Up *
12. How Rude She Was *
13. Seen It All

 

Vidéos : 

“I’m A Rat”

 
“On A Noose”
 
 
“How Rude She Was”
 
 
“Fuck It Up”
 
 
 
 
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