(Nonesuch 2011)
Avant même sa sortie, le nouvel album des Black Keys suscitait craintes et discussions diverses : le duo formé par Pat Carney et Dan Auerbach il y a une dizaine d’années, et qui proposait un rock’n’roll brut, a connu une trajectoire étonnante : en 2008, l’album Attack & Release, issu d’une collaboration avec Danger Mouse, apporte au groupe un élément pop. Deux ans plus tard, à la sortie de Brothers, The Black Keys rencontrent un succès extraordinaire qui les fait changer de statut : pour l’industrie du disque, ils sont à présent une des valeurs sûres de la scène rock américaine.
Après avoir fait construire leur propre studio d’enregistrement à Nashville, les Black Keys ont retrouvé Danger Mouse pour enregistrer et produire un nouveau disque, le tout dans une ambiance merveilleuse : le producteur et le groupe n’ont pas manqué une occasion d’expliquer à quel point ils s’entendaient bien, et que le travail sur ces chansons avait été un réel plaisir. Nous en sommes bien contents, même si, heu, comment dire, excusez-moi : on s’en tape. El Camino est composé de onze nouvelles chansons ; composées et produites par ce qui semble désormais être un trio : Carney / Auerbach / Burton. Musicalement, il poursuit l’évolution du groupe : le son est de plus en plus ample et de moins en moins caractéristique. Le groupe est sûr de sa force – au vu de son parcours, on le serait à moins – et profite de chaque piste pour montrer à son auditoire de quoi il est capable.
Malheureusement, le groupe succombe trop souvent – à notre goût – à la tentation de livrer des pistes renversantes : la production est ainsi énormément chargée (« Run right back »), et la rythmique parfois franchement irritante (« Sister »). Les deux premières minutes de « Little Black Submarines » sont très belles, Auerbach chante avec une grande élégance une jolie ballade à l’accompagnement minimal, avant l’arrivée du groupe sensé transfigurer la chanson, et qui ne fait que l’alourdir inutilement. Même si certains aspects de leurs morceaux en rappellent de plus anciens (« Money Maker »), les Black Keys se sont bel et bien transformés en une machine de guerre, et ce dernier album ne fait que confirmer le virage pris il y a quelques années.
Cette différence d’approche se traduit par d’immenses différences dans les productions du groupe, et justifie à la fois les fans de la première heure dans leur jugement et l’augmentation du succès populaire des Black Keys. Quelques compositions restent très convaincantes (dont « Lonely Boy », premier single et justement placé en début d’album), certains passages restent immédiatement en tête (l’ouverture de « Nova Baby » ou le riff de « Mind Eraser », qui rappelle « Miss You », des Rolling Stones), mais au final, il apparaît que ce disque manque cruellement d’inspiration.
Tracklisting :
- Lonely boy *
- Dead and gone
- Gold on the ceiling *
- Little black submarines
- Money Maker
- Run right back
- Sister
- Hell of a season
- Stop stop
- Nova baby
- Mind eraser
Vidéo :
“Lonely Boy”