(In The Red 2011)
Alors qu’une compilation de la plupart de leurs singles vient de paraître chez Castleface (Singles vol. 1 + 2), Thee Oh Sees prouvent qu’ils n’ont rien prévu de leur incroyable productivité, en livrant seize nouvelles chansons sur ce nouvel album, dont quelques reprises assez inattendues.
Après avoir accordé à la pochette les quelques minutes de contemplation dubitative qu’elle mérite (comme toujours avec les Oh Sees) et avoir tenté de la mettre en relation avec son titre étonnant, nous avons lancé ce disque, qui était un de ceux que nous attendions avec le plus d’impatience cette année.
Le premier morceau, « I Need Seed », est assez éloigné du genre de pistes garage-rock qui avaient permis au groupe d’être reconnus il y a deux ans (avec la sortie de l’album Help). Le rythme est saccadé – sur un tempo relativement lent, et la guitare acoustique place le disque sur des bases d’un étrange acid-folk. Le riff et la mélodie sont accrocheurs, la voix éraillée de John Dwyer fait merveille – et à le mérite de conquérir ou de rebuter instantanément l’auditeur. Les deuxième et troisième pistes s’écartent en revanche de ce format, et possèdent d’étranges orchestrations (violons, flûtes, cuivres), aussi ambitieuses que dissonantes… L’intégralité de Castlemania est à l’image de ces premières chansons.
Le disque oscille entre les pistes garage-rock percutantes, souvent gorgées d’une guitare fuzz généreuse (« A Wall, A Century », « Corrupted Coffin »), et ces chansons qui ont pour seul point commun l’utilisation d’effets sonores délibérément bruitistes (la chanson-titre « Castlemania » est un véritable morceau de bravoure, avec des chœurs mémorables). Notons qu’au sein de l’album se trouvent deux belles reprises de titres des années soixante (« If I Stay Too Long » de The Creation et « I Won’t Hurt You » de The West Coast Pop Art Experimental Band, un groupe dont nous avons parlé récemment.
L’auditeur a parfois l’impression de se trouver en présence d’un joyeux n’importe quoi : la chanson de moins d’une minute « Spider Cider », la plupart des chœurs du disque, le son de la guitare solo qui devrait provoquer des retours d’acides chez les rescapés des années 1968-1972. Pourtant, quelles que soient les directions dans lesquelles semblent s’échapper leurs compositions, Thee Oh Sees parviennent toujours à leur but, de façon assez déconcertante. Depuis Dog Poison et Warm Slime, il était clair que les Oh Sees étaient capables de tout : avec ce disque, ils ont franchi une étape supplémentaire en insérant à leur univers des éléments étonnants et novateurs : la piste instrumentale pleine de mélancolie «The Horse Was Lost » (on ne reviendra pas sur les doubles sens du mot ‘horse’) et la lancinante «What Are We Craving? » sont proprement édifiantes.
Le voyage auquel nous invitent Thee Oh Sees avec ce Castlemania sera certainement trop expérimental pour certains, qui seront peut-être gênés par les influences sous-jacentes de l’acid-folk et les instrumentations ambitieuses et intransigeantes, dignes des plus grands dérangés de la musique psychédélique. Cependant, nous ne pouvons que leur conseiller d’accorder à cet excellent disque l’écoute attentive qu’il mérite : Castlemania est une belle réussite.
Tracklisting :
- I Need Seed *
- Corprophagist (a bath perhaps) *
- Stinking Cloud
- Corrupted Coffin *
- Pleasure Blimps
- A Wall, a century 2 *
- Spider Cider *
- The Whipping continues
- Blood on the deck
- Castlemania
- AA Warm breeze
- Ideal for rubber dog
- The Horse was lost
- I won’t hurt you
- If I stay too long *
- What are we craving?
Le site Officiel de Thee Oh Sees : www.theeohsees.com
Vidéo :
“I Need Seed”
Vinyle :
Le disque est un double vinyle. Le deuxième disque n’a qu’une face gravée.