(Jagjaguwar 2014)
On les pensait cramés, au bout du rouleau après leurs multiples frasques sur et hors de scène et leur combustion spontanée après la remarquable percée de We Are The 21st Century Ambassadors Of Peace And Magic. Le disque solo de Jonathan Rado sorti en 2013 semblait sonner le glas du groupe mais contre toute attente le duo s’est reformé et est ressuscité de ses cendres avec un album à la (dé)mesure de son excentricité.
“…And Star Power” est ainsi un double-album (ça semble être la mode cette année) qui contient une vingtaine de morceaux aussi barrés que variés. Un grand foutoir auto-complaisant encore plus à l’ouest que le suicide commercial de MGMT en début d’année, un disque dont la seule ligne conductrice semble être celles que le chanteur Sam France s’enfile à longueur de journée.
Là où We Are The 21st Century … était pop, concis, frais et inspiré, …And Star Power se présente comme la synthèse malhabile de sessions studio chaotiques. Manifestement décidé à ne rien laisser en chemin, le duo publie ici 24 morceaux (pour plus de 80 minutes de musique) dont la moitié sonne comme des maquettes sommaires.
Sous influence Todd Rundgren manifeste, Foxygen réussit quelques ballades écrites au piano qui semblent sorties tout droit de Something/Anything, comme “How Can You Really”, et comme toujours chez ce groupe, les meilleures chansons sont inspirées de classiques pop des années soixante, à l’image de “Cosmic Vibrations” qui pompe la mélodie de “Long, Long, Long” de George Harrison (sur Let It Be des Beatles).
Malheureusement, ces quelques moments de grâce sont ici noyés dans un océan de platitude, entre démos mal dégrossies (“I Don’t Have Anything/The Gate”), instrumentaux à moitié-cuits (“Star Power I : Ouverture”) et tentatives punk lo-fi creuses (“Hot Summer”, du Suicide de supermarché, “Brooklyn Police Station” enregistré avec Tim Presley qui ne parvient pas à sauver le truc de la noyade). L’impression qui ressort de l’écoute de ce disque, c’est que Foxygen prend plaisir à faire n’importe quoi et s’imagine subversif en passant du coq à l’âne. Le problème, c’est que sans chanson notable, tous ces effets ne sont que de vaines gesticulations. On voudrait croire à un grand disque malade façon Madcap Laughs de Syd Barrett mais on a du mal à croire en l’honnêteté de Sam France, artiste indéniablement doué mais dont les talents de faussaire ne sont plus à démontrer.
L’impression d’écouter deux musiciens diluer leur talent dans la drogue et s’imaginer réaliser un album-concept génial est tenace. S’il prennent un malin plaisir à saboter leurs propres chansons, les deux compères n’ont pas pour autant pondu ici un chef d’oeuvre perdu. Car derrière les couches de distorsion, les arrangements déglingués et la production lo-fi ne se cache aucun grand morceau sacrifié. “…And Star Power” est juste un disque raté, un foutage de gueule sans queue ni tête, et une véritable insulte aux fans du groupe.
Tracklisting
- Star Power Airlines
- How Can You Really
- Coulda Been My Love
- Cosmic Vibrations
- You & I
- Star Power I: Overture
- Star Power II: Star Power Nite
- Star Power III: What Are We Good For
- Star Power IV: Ooh Ooh
- I Don’t Have Anything/The Gate
- Mattress Warehouse
- 666
- Flowers
- Wally’s Farm
- Cannibal Holocaust
- Hot Summer
- Cold Winter/Freedom
- Can’t Contextualize My Mind
- Brooklyn Police Station
- The Game
- Freedom II
- Talk
- Everyone Needs Love
- Hang
Vidéos
“How Can You Really”
“Coulda Been My Love”