(Birdman 2002, puis Mute 2003 avec une pochette orange et noire)
Horse power. Nuages d’héroïne et vapeurs de LSD nourissent cet album hédoniste qui a ressuscité, au plus fort de la vague garage-rock de 2001-2003 un genre tombé dans l’oubli, le space-rock psychédélique.
Auréolés d’une aura de mystère, les Warlocks sont une hydre à sept têtes au looks de motards et aux poches sous les yeux qui produisent un son unique, gigantesque. Ils viennent de San Francisco, mecque hippie et défonçoir le plus célèbre de la planète, ville où les drogues font partie prenante du quotidien d’une partie importante de la population, un art de vivre à part entière, un héritage laissé par les Merry Pranksters et les beautiful people d’Haight Ashbury. L’existence entière des Warlocks semble graviter autour des psychotropes scandés dans les refrains de Bobby Hecksher qui, avec sa musique, célèbre cette culture de la défonce, sa culture.
On a vu plusieurs groupes se vautrer dans des albums condescendants gravés sous l’emprise de substances. Le résultat est toujours navrant. Ce qui frappe chez les Warlocks, c’est le côté totalement assumé de leur addiction, une célébration même. A l’image d’Hawkwind, inspiration space-rock manifeste du combo (dont la plupart des membres sont morts d’overdose), cocaïne, heroïne et autres drogues résonnent ici comme des types de carburant qui alimentent le moteur du vaisseau Warlocks. Dans cette débauche, le groupe avance soudé et crée une musique compacte, tribale mais aérienne. Un rock’n’roll trippant, cosmique et lourd qui convie les fantômes de Steppenwolf, Hawkwind et Amon Duul II.
Elevation cosmique
Le mur de son crée par les musiciens – trois guitares, deux batteries, une basse, un clavier – rend le décollage poussif, à l’image d’une fusée qui part en orbite. Une fois l’envol pris, rien ne peut arrêter la trajectoire des Warlocks qui touchent les sommets lors des voyages (ou trips, c’est comme vous voulez) que sont “Shake The Dope Out”, “Baby Blue”, “Hurricane Heart Attack”, “Inside Outside”. Certains morceaux possèdent néanmoins un tempo plus relevé, à l’image du puissant “Stickman Blues” ou de “The Dope Feels Good”. En accord avec l’éthique du groupe, aucun accord mineur ne vient gêner cette élévation cosmique.
La simple lecture des titres glisse un sourire au coin des lèvres tant cette approche peut paraître caricaturale. Pourtant, rien dans cet album ne prête à rire et l’intégrité du groupe ne saurait être mise en cause. Les Warlocks parlent drogue comme les Arctic Monkeys parlent des rues de Sheffield : c’est leur quotidien, ils l’évoquent sans recul. Cet album est la célébration d’une certaine façon de vivre, d’un hédonisme créatif. Evidemment, toute bonne chose ayant une fin, le chemin des Warlocks sera plus tard parsemé de morts et déconvenues, menant à l’inévitable gueule de bois de l’album Surgery en 2005, le son d’un groupe en souffrance.
En 2002 les Warlocks arboraient l’assurance et la classe d’un groupe au sommet de son art, Phoenix en est le témoignage magnifique. Le space-rock renaît de ses cendres.
Tracklisting :
- Shake the Dope Out *
- Hurricane Heart Attack *
- Baby Blue *
- Stickman Blues *
- Cosmic Letdown
- The Dope Feels Good *
- Moving and Shaking
- Inside Outside
- Stone Hearts *
- Oh Shadie
Vidéos :
“Baby Blue”
“Hurricane Heart Attack”
“Shake The Dope Out”
Vinyle :
Deux versions des pochettes de l’album. La version vinyle ci-présente reprend les motifs des couteaux d’Andy Warhol.