(2007)
Nick Cave a décidé de se laisser pousser une grosse moustache et de se la jouer heavy rock’n’roll avec son pote violoniste-dingue-barbu Warren Ellis (leader des géniaux Dirty Three) et deux autres vieux de la vieille en pleine mid-life crisis… Et alors ? Est-on pour autant obligé de crier au génie ? On commence à en avoir marre des vieux machins qui s’y imaginent que rejouer aux cowboys les fera retrouver leur âme d’enfant (à ce propos on citera Jean-Claude Tergal qui dit fort justement qu’il vaut mieux “garder son âme d’enfant que sa bite d’enfant »).
Grinderman est donc le nouveau projet adolescent de l’artiste australien Nick Cave, qui a décidé de s’éloigner temporairement de ses mauvaises graines (quoique…) et d’envoyer du gros rock’n’roll. Fuzz omniprésente, piano-bar martelé jusqu’à la rupture, rythmes tribaux, gros riffs lourds et phrases choc (“Kick those white mice and black dogs out ! Kick those white mice and babooooooons out ! Kick those baboons and all the muthafuckers out and then… get it on ! ») – Grinderman jouent la carte de l’authenticité rock et font rapidement sauter tous nos préjugés avec un début d’album sévèrement burné.
“Get It On” rentre dans le lard sans ménagement, on sent tout de suite qu’on a affaire à un groupe de classe. Derrière, Cave, dans l’intro de “No Pussy Blues”, reprend le flow de Bob Dylan dans “It’s Alright Ma I’m Only Bleedin'” en y collant des paroles emplies de frustration sexuelle et une explosion cataclysmique de guitares en guise de refrain. On est scotché dans son fauteuil. Malheureusement, le rythme retombe rapidement à cause d’une demi-douzaine de morceaux lents qui entraînent l’auditeur dans une léthargie malvenue. Si “Electric Alice” propose une ambiance à la Calexico où Cave envoûte en tant que crooner post-apocalyptique, “Grinderman” ne décolle jamais pendant quatre interminables minutes. Le groupe essaie de relancer la machine avec “Depth Charge Ethel”, un pastiche décent des Dirtbombs, mais retombe dans ses travers avec “Go Tell The Woman”, un morceau de spoken word à l’ambiance bluesy et un rock FM chiant, “I Don’t Need You (To Set Me Free)”, plus proche de Tom Petty que des Stooges. Après les débuts rock’n’roll de l’album, on attendait du groupe qu’il envoie du gros son. On n’est finalement satisfait qu’au huitième morceau “Honey Bee (Let’s Fly To Mars)” où Grinderman retrouvent leur teigne et envoient un orgue farfisa saturé se frotter à des guitares puissantes. Les deux morceaux suivants, qui voient Cave reprendre sa pose de cowboy-crooner (avant un ultime morceau rock’n’roll, “Love Bomb”), ne font qu’amplifier l’impression de déception qu’on a en écoutant cet album. L’album, censé osciller entre morceaux nerveux et ambiances blues sombre, est noyé sous le flot des chansons inutiles.
Grinderman ne compte que onze chansons mais en possède sans doute trois de trop. Il aurait sans doute mieux valu proposer un album compact de 30 minutes pour lui éviter de s’enliser dans un faux rythme avec des morceaux longs et peu emballants. Quand le groupe se lâche, sa puissance de feu est impressionnante, son rock dévastateur. On entend trop peu cette facette de Grinderman ici (sur trois morceaux seulement), et on reste sur sa faim. Comme dirait Josh Homme : “gimme some more, gimme some more“.
Tracklisting :
1. Get It On *
2. No Pussy Blues *
3. Electric Alice
4. Grinderman
5. Depth Charge Ethel
6. Go Tell The Woman
7. I Don’t Need You (To Set Me Free)
8. Honey Bee (Let’s Fly To Mars) *
9. Man In The Moon
10. When My Love Comes Down
11. Love Bomb *
Vidéo :
Grinderman joue “No Pussy Blues” à Later With Jools. Morceau de l’année ?