À la surprise générale, il semblerait que l’examen de la série Rubble touche à sa fin. Rien de grandiose pour l’instant dans ce chant du cygne. Non que l’on s’apprête à parler d’un mauvais disque, non : le soir tombe doucement et paisible sur l’épopée Rubble, et il n’est pas déplaisant de siffloter sur le monde mineur après les prouesses freakbeat et les exploits popsike.
Contrairement à de nombreux Rubble inégaux depuis The Magic Rocking Horse, Eiderdown Mindfog (dont la parution officielle ne remonte, tout comme le volume précédent, Rainbow Thyme Wynders, qu’à l’édition en deux coffrets en 2003 chez Past & Present) est un disque de tenue régulière, toujours agréable, sans accident de parcours ni sommet notable. Il faut convenir que les compilateurs ont raclé pour de bon les fonds de tiroirs. Pas un nom de groupe évoquant le moindre souvenir (sauf pour les plus attentifs auditeurs de notre anthologie), même au dernier rang de la troisième division, c’est un genre de performance. Or, le problème de cette pop pourtant de qualité et vite séduisante, c’est son manque général d’urgence et de nécessité… à l’exception peut-être de deux titres plus martiaux et directs que les autres. Les fantastiques et hélas éphémères The Barrier (déjà appréciés sur A Trip In A Painted Word) font exploser un freakbeat aux guitares ébréchées dans la plus intransigeante lignée des Fleur de Lys, tandis que les Israéliens Lions Of Judah envoient un hard rock percutant éclaboussé de sauvages giclées d’orgue.
Peu de grosses émotions ; néanmoins, aucune réelle faiblesse. La plupart des disques parus en 2011 peuvent-ils en dire autant ? Toutes les chansons ont au moins un petit quelque chose pour plaire ; chacune se signale par un motif intéressant, une formule frappante ou une trouvaille (un pont astucieux, une attaque de voix, des arrangements bienvenus) – et l’on se surprend à siffloter irrésistiblement mainte rengaine de ce disque, alors même qu’aux premières écoutés, on avait un peu tôt jugé son charme assez superficiel. Pour l’essentiel, on y entend des mods retardataires jouer de la soul lyrique à jabot (Moving Finger) encore loin de la lourdeur de Vanilla Fudge. Citons aussi Cinnamon Quill et son « Candy » qui balance, Fourmyula, et surtout les Scots Of St.James, bons épigones des Small Faces. Par ailleurs, beaucoup de pop bien troussée, tantôt assez entraînante (Lyons & Malone, ou Icarus) tantôt nonchalante (Portobello Explosion), voire mignonette (Together), ou encore orchestrale et mignonette (dans la décidément inévitable catégorie des transfuges de The Move, aujourd’hui Sheridan – Price).
L’attention sera surtout attirée par l’étonnant couple égyptophile Rameses & Selket, qui, par-delà son look irrésistible, empile sans vergogne les clichés les plus éculés de l’hypnotisme psyché (sitar, mélopée orientalisante, vocaux frissonnants, toute la quincaillerie y passe), et pourtant ça marche ! « (In My) Mind’s Eye » et « Crazy One » happent d’un coup l’auditeur. Enfin, les morceaux les plus prenants de cet avant-dernier Rubble sont contrastés : Hayden Wood offre une ballade glacée, qui entrelace guitare acoustique et basse fuzz, et dont l’atmosphère étrange évoque Kaleidoscope et Syd Barrett. Le sautillant « Fire » de Cybeline, lui, réveillera chez l’auditeur des souvenirs d’Idle Race et The Move.
Tracklisting :
01. Rameses & Selket – (In My) Mind’s Eye *
02. . The Lions Of Judah – Katja *
03. Lyons & Malone – She’s Alright
04. The Moving Finger – Pain Of My Misfortune
05. The Barrier – Dawn Breaks Through *
06. Cinnamon Quill – Candy
07. The Scots Of St. James – Timothy
08. Icarus – The Devil Rides Out
09. The Fourmyula – Honey Chile
10. Portobello Explosion – We Can Fly
11. Rameses & Selket – Crazy One *
12. Hayden Wood – The House Beside The Mine *
13. The Scots Of St. James – Eiderdown Clown
14. Together – Memories Of Melinda
15. Sheridan-Price – Tracey Smith
16. The Cymbaline – Fire *
Vidéos :
Scots Of St.James – Eiderdown Clown