(Editions Seghers 1990)
L’auteur de cette encyclopédie, Gérard Herzhaft, est un “romancier, historien, musicien et musicologue” français qui a consacré de nombreux ouvrages aux musiques traditionnelles nord-américaines; il est notamment l’auteur (dans la collection “Que sais-je?”) des volumes La Country Music et Le Blues.
Le travail de recherche et de documentation effectué par l’auteur pour collecter les informations présentées ici est impressionnant: cette Encyclopédie du Blues présente les artistes ayant enregistré du Blues (et les artistes apparentés, les “songsters” tels que Leadbelly ou Henry Thomas) depuis le morceau “Crazy Blues” chanté par Mamie Smith (1920) jusqu’aux bluesmen du début de la décennie 1990. Pour présenter ce qui correspond à soixante-dix années de musique, l’auteur a opté pour un classement en ordre alphabétique, qui comprend évidemment les artistes, mais aussi de nombreux thèmes (exemples de thèmes: “Blues Revival”, “Guitare”, “Texas”…). Ce choix arbitraire et qui peut sembler déroutant s’avère en fin de compte assez pertinent et permet une utilisation assez simple de l’ouvrage.
Chaque article consacré à un artiste comporte une note biographique assez complète, les dates de naissance (et de mort) de l’artiste, les instruments dont il jouait, ses influences (les artistes qui l’ont marqué, et ceux qu’il a influencés), et des commentaires sur quelques-unes de ses chansons. Pour prendre l’exemple d’un des plus importants bluesmen de l’histoire, “Charlie Patton (vers 1887-1934) (vcl/g)” ; “un des premiers bluesmen du Mississippi à avoir enregistré (en 1929)” ; “son style de guitare, uniformément brillant et inventif, est marqué par un extraordinaire sens du rythme, accentué par un jeu de basses frappées qui crée une tension et un mouvement incessants” ; “40 ans après sa mort, on s’en rappelle encore comme d’un individu violent et belliqueux, grand coureur de femmes, illettré, élevé sur une grande plantation…” ; “nombre (de ses disques) sont devenus des classiques (Poney Blues, High water everywhere…)” ; “son influence, directe ou indirecte, a été considérable sur plusieurs générations de musiciens : les “pères” du Delta Blues: Tommy Johnson et Son House (…), à Chicago Howlin’ Wolf, Eddie Taylor…” A la fin de l’article, l’auteur recommande le disque Founder of the Delta Blues (sorti par Yazoo).
Pour les articles consacrés aux thèmes, la variété des notions explorées rend impossible de donner un exemple qui conviendrait à chacune d’entre elles. L’ouvrage présente les particularités des régions (“Californie”, “East Coast Blues”, “Texas”), des villes (“Memphis”, “Saint-Louis”, “Nouvelle-Orléans”, “Detroit”…), les spécificités de différents instruments classiques du blues (“Guitare”, “Harmonica”, et même “Saxophone”…), et des styles musicaux fortement marqués par le Blues (“Boogie-Woogie” “Soul”) et des regroupement d’artistes par catégories (“Blues Shouters”, “Classic Blues Singers”, “Blues Blanc”…).
En fin d’ouvrage, l’auteur propose une sélection bibliographique (livres, revues et magazines), puis une sélection discographique, qui peut paraître importante (deux cents C.D. y sont répertoriés), mais il ne faut pas perdre de vue que la période couverte est de soixante-dix ans (ce qui, en fin de compte, ne représente qu’un peu moins de trois albums par an…). La dernière partie du livre, intitulée “Les principaux Blues”, présente (et la plupart du temps, avec une grande précision) les origines de quelques 300 chansons; par exemple, le morceau “Mr Downchild” : “Avec certitude, “Mr Downchild” est une composition de Robert Johnson que Johnson n’a jamais enregistrée. C’est Robert Jr Lockwood qui a transporté ce blues jusqu’à Sonny Boy Williamson (Rice Miller) qui l’a enfin enregistré le 4 décembre 1951 sur Trumpet 168! Robert Jr Lockwood en a donné une brillante version très proche du style de son mentor Robert Johnson sur Trix 3307 (le 8 juin 1973). A noter que dans la version en public gravée par Sonny Boy en 1963 en compagnie des Yardbirds, Eric Clapton prend son tout premier solo discographique.”
Avec cette Encyclopédie du Blues, Gérard Herzhaft a conçu et réalisé un ouvrage qui, par l’étendue et la précision des informations apportées, ne peut qu’être considéré comme une référence.