(V2 2009)
Exilés à Berlin pour s’éloigner de la scène anglaise qu’ils trouvent stupide (on partage leur avis), The Rakes reviennent de la capitale allemande avec un nouvel album sous le bras. Un choix intéressant de la part de ce groupe londonien jusqu’au bout des ongles qui a su décrire mieux que quiconque le lifestyle des yuppies de la City (“22 Grand Job”) ou le train-train du lad moyen (“Work Work Work (Pub Club Sleep)”, “Repeat”). Tout aussi bon qu’il soit, il manquait un grain de folie au précédent Ten New Messages pour en faire un album mémorable, et l’espoir était grand que les Rakes retrouvent leur folie à l’occasion de ce Klang! au titre annonciateur de bonnes choses.
Alors que plus rien de bon ne semble sortir de Grande-Bretagne, c’est avec un peu d’appréhension qu’on glisse le disque sur la platine et qu’on pose délicatement le saphir sur le sillon. Les Rakes vont-ils merder eux aussi ? Les premières notes de l’album rassurent. Un premier riff de guitare chaloupé, une rythmique binaire, puis la voix d’Alan Donahue : on retrouve les Rakes de Capture/Release, et on ne s’en porte pas plus mal. Malheureusement on déchante très vite. Quelques morceaux fonctionnent plutôt bien, avec toujours la même formule efficace éprouvée par le groupe – rythme entraînant, mélodies qui restent en tête, quelques breaks de guitare qui viennent briser les reins – mais l’album dans son ensemble ressemble trop à une photocopie ratée de Ten New Messages. C’est loin d’être mauvais, c’est même plutôt bon par moments, mais ça sonne déjà entendu, à l’image de “The Loneliness Of The Outdoor Smoker”, “That’s The Reason” ou “1989”.
Le problème de Klang!, au-delà du manque de variété dans les morceaux et de l’impression de répétitivité qu’il génère, demeure sa qualité d’écriture décevante. Les textes d’Alan Donohue reprennent des thématiques attendues – sexe, vie nocturne, mal-être -, avec encore un morceau qui traite de la clope en extérieur (“The Loneliness Of The Outdoor Smoker”, moins drôle que le “Wanna Smoke” de Graham Day). mais ont perdu de leur efficacité. La concision qui faisait la force de Donohue fait aujourd’hui place à des longs passages parlés moins percutants. Au détour d’une rime, le chanteur parvient parfois à nous faire sourire, mais on s’attendait à mieux de la part de cet auteur attachant (par ailleurs l’album s’ouvre sur un “sometimes you can’t smell the shit when you’re in it” qui peut être plutôt drôle si on fait partie de ceux qui considèrent cet album comme mauvais).
En outre, Klang! souffre d’un manque d’inspiration manifeste de la part des Rakes. Nombreux sont les morceaux qui tournent à vide, sans réelle mélodie ni énergie. L’apathie du groupe nous vaut quelques pistes laborieuses comme “Muller’s Ratchett”, ce “Shackleton” qui surprend par son faux rythme lénifiant ou “Bitchin In The Kitchen” qui avance à un rythme de sénateur et ne décolle que faiblement en fin de morceau lors d’un solo paresseux et d’un refrain facile. Qu’arrive-t-il à Matthew Swinnerton ? Qu’est devenu le guitariste inspiré de Capture/Release ? Il traverse l’album de façon anonyme, récitant sa leçon de new-wave sans génie.
Le seul moment où Klang! finit par surprendre reste le morceau “The Woes Of The Working Woman” dans lequel le groupe semble prendre du plaisir. Après une intro au piano bastringue, la chanson commence façon délirante avec un passage où Donohue prend un accent prolo, sur fond de musique de cabaret. C’est de loin le moment le plus amusant de l’album, un des rares où on retrouve le fun du premier album, la côté gentiment déjanté des Rakes qui fait le charme de “22 Grand Job”. Le groupe y est imprévisible et s’amuse à prendre l’auditeur à contrepied comme à sa meilleure heure. On aurait aimé qu’il en soit de même pour tout l’album.
Tracklisting :
1. You’re in It *
2. That’s the Reason *
3. The Loneliness of the Outdoor Smoker
4. Bitchin’ in the Kitchin’
5. The Woes of the Working Woman *
6. 1989 *
7. Shackelton
8. The Light from Your Mac
9. Muller’s Ratchet
10. The Final Hill
11. Never Get Married
Vidéo :
“1989”